Comment la socialisation articule-t-elle l'individuel et le collectif ?

Pour revenir au sommaire des SES, c'est ici...    et pour la version affichant une question par sous-partie, c'est par là...    (droits réservés)


Accroche   Robin Crusoé, seul sur son île déserte, est un personnage de fiction. Nous dépendons les uns des autres pour satisfaire nos besoins les plus fondamentaux, y compris psychologiques. L'être humain ne peut pas vivre durablement en dehors de la société qu'il forme avec d'autres. Cela pose le problème de l'articulation des comportements individuels les uns avec les autres, et par rapport aux besoins et aux objectifs de la collectivité dans son ensemble.

Définition de mot-clé
   - socialisation :  intériorisation, par les individus qui en sont membres, des façons de penser dans un groupe social (valeurs), ainsi que des comportements qui y sont attendus selon le rôle de chacun (normes); il est habituel de distinguer la socialisation primaire, dans l'enfance, de la socialisation secondaire tout au long de la vie

Rappel : il faut toujours annoncer en fin d'introduction les titres des parties principales du développement, juste après avoir posé explicitement la question du sujet. Il est souhaitable de reformuler cette dernière plutôt que de la recopier telle quelle dans l'introduction, et il faut si possible y associer une problématique, c'est-à-dire la décomposer en deux, trois ou quatre questions.


1/ La socialisation distingue les individus en même temps qu'elle leur transmet des habitudes communes de comportement


 a) Chaque individu intériorise des normes et des valeurs transmises par son entourage

Il faut bien que nos comportements soient prévisibles pour que nous puissions nous coordonner et atteindre des objectifs communs. D'autant que les ressources sont plus ou moins rares, ce qui entraîne de la rivalité pour les acquérir... et les individus ont en outre tendance à désirer ce que les autres désirent, à vouloir posséder ce que leurs semblables possèdent. D'où un risque de violence incompatible avec la survie du groupe social, si elle n'était pas contenue par certains mécanismes à l'oeuvre dans toutes les sociétés .

Ce qui résout le problème au sein des collectivités humaines, c'est le fait que nous avons l'habitude de suivre des règles de comportements. Nous acceptons des limites à nos désirs, qui nous rendent prévisibles dans le cadre des travaux collectifs, et limitent la violence. On les appelle des normes sociales, car elles nous sont transmises par notre entourage. Les individus qui ne les suivent pas sont mis à l'écart ou sanctionnés par le groupe d'une autre manière. D'ailleurs nous avons tendance à imiter les comportements autour de nous, ce qui est une autre manière d'intérioriser les normes sociales. En plus de nous transmettre des façons d'agir, notre entourage nous communique aussi des façons de penser, ce qu'on appelle des valeurs pour les distinguer des normes.


 b) Les normes suivies distinguent les individus à la fois d'autres groupes et selon leur rôle à l'intérieur du groupe

Les normes et les valeurs sont différentes selon les groupes auxquels les individus appartiennent. Ainsi les Français apprécient qu'un interlocuteur prenne le temps d'expliquer les raisons d'une de ses décisions; le contraire pourrait parfois paraître brutal ou manquer de chaleur humaine. Aux yeux des Russes en revanche, un excès de justifications évoque le comportement de quelqu'un qui a des choses à cacher. Et ce qui passe pour de la froideur dans le Sud de la France peut découler chez un parisien d'une sensibilité élevée à la liberté de chacun.

A l'intérieur d'un même groupe, le comportement attendu d'une personne peut également être différent, et même parfois complètement opposé, en fonction du rôle qui lui est attribué. Ainsi dans le groupe que constitue une classe avec une trentaine d'élèves, l'enseignant a un rôle distinct de ces derniers : on n'attend pas de lui qu'il se taise la plupart du temps, alors que la prise de parole de chaque collégien ou lycéen doit au contraire être limitée pour que les objectifs d'apprentissage puissent être atteints. Les comportements attendus sont aussi différents selon l'âge ou le sexe. Par exemple une vieille personne risque d'être placée plus rapidement en maison de retraite si elle décide de porter des jeans troués, un comportement pourtant couramment accepté chez les jeunes. On n'offre pas non plus les mêmes jeux au petits garçons et aux petites filles : aux uns les maquettes d'avions, aux autres les cuisinières. Et à l'adolescence on acceptera plus facilement d'un garçon qu'il dorme chez des amis.


2/ La diversité des agents de socialisation, y compris au sein d'une même catégorie comme la famille, fait de chaque trajectoire individuelle un cas unique


 a) La socialisation primaire opérée par la famille est particulièrement importante mais elle n'est pas le seul agent de socialisation

Pour le jeune enfant, il est difficile d'accepter d'être limité dans ses désirs, mais s'il ne l'apprend pas il ne pourra jamais devenir un adulte autonome, adapté à la vie en société. Et c'est plus facile pour lui d'apprendre à accepter des contraintes, si ceux qui règlent son comportement, ceux qui limitent à un moment donné la satisfaction de ses envies, sont les mêmes personnes qui répondent à ses désirs à d'autres moments : sa mère d'abord, dès qu'elle commence à l'alimenter. C'est la raison pour laquelle les enfants qui ne peuvent pas être élevés par leurs parents biologiques sont en général placés dans des familles d'accueil, plutôt que dans des institutions où les professionnels chargés de leur éducation seraient trop nombreux. Le risque de produire des adultes révoltés, incapable d'accepter les contraintes sociales nécessaires pour satisfaire leurs besoins, est plus important lorsque dans leur enfance ils répartissent les adultes entre bons et méchants, selon la réponse donnée le plus souvent par les uns et par les autres à leurs demandes.

D'autres acteurs que la famille jouent cependant un rôle dans la socialisation des individus, en particulier dans le cas de la socialisation secondaire, après l'enfance. Les collègues au travail ou les camarades en classe, c'est-à-dire ce qu'on appelle les groupes de pairs (les égaux), imposent aussi des contraintes de comportement. Cela peut concerner par exemple la façon de s'habiller ou de se saluer les uns les autres. Les chefs de service ou les patrons, les entraîneurs sportifs, les autorités religieuses, politiques, ou militaires, assurent également cette fonction. Il faut noter toutefois que le rôle de socialisation de la famille ne s'arrête pas à l'enfance : on suit aussi des règles pour ne pas déplaire à son conjoint ou à ses enfants par exemple.


 b) La socialisation par la famille s'exerce différemment selon la configuration familiale

L'organisation d'une famille peut être différente du point de vue des personnes qui vivent ensemble, mais aussi des relations avec les proches parents.

Dans une famille nombreuse par exemple, les enfants ont tendance à être responsabilisés plus tôt, notamment les plus âgés qui aident à s'occuper des plus petits. Lorsque les enfants vivent avec un parent resté seul (famille monoparentale), ils ont également tendance à être davantage responsabilisés, même si l'exercice de l'autorité peut par ailleurs être compliqué par la solitude affective de la mère ou du père en question. Dans les familles recomposées, avec un nouveau conjoint du parent et parfois des beau-frères ou des demi-soeurs, la pluralité des façons de voir peut donner un esprit plus ouvert, mais en même temps rendre parfois la règle moins claire.

Du point de vue des relations avec la parentèle, la situation est différente selon qu'il existe des grands-parents disponibles par exemple, ou encore d'autres adultes susceptibles de s'occuper des enfants, oncles, tantes, ou arrière-grands-parents. Ils peuvent confronter l'enfant à des normes et des valeurs différentes, comme c'est le cas aussi dans une famille recomposée. Le niveau d'études de certains d'entre eux, comme celui des parents et tout particulièrement de la mère, peut être un facteur de réussite scolaire.



Rappel : il faut toujours conclure le devoir en commençant par résumer la réponse, apportée par le développement, à la question du sujet. On peut s'inspirer pour cela des titres des parties principales annoncés en fin d'introduction, mais il faut donner de ces quelques phrases une version plus détaillée et si possible plus affirmative, compte tenu des précisions données plus haut dans le développement.

Elargissement du sujet vers d'autres questions   La nature et la société font de chaque humain un être à la fois unique et indissociable de son entourage social. Cela pose en définitive la question de comment définir, dans ces conditions, la liberté et la responsabilité individuelle... mais c'est un sujet plus philosophique que sociologique.